Site icon Le site de l'Histoire | Histoire | Historyweb.fr

La bataille de Dien Bien Phu (1/5)

La bataille de Dien Bien Phu | Site d'Histoire | Historyweb

La bataille de Dien Bien Phu marque le tournant de la guerre d’Indochine. Dans ce terrible affrontement entre une puissance coloniale sur le déclin et un peuple qui lutte pour l’indépendance de sa terre, les français vont engager leurs meilleures troupes d’élite et le Viêt Minh va mobiliser des dizaines de milliers de combattants et de porteurs. Un affrontement titanesque qui va durer au total 170 jours. 170 jours d’une lutte furieuse et sans merci, où l’horreur absolue va le disputer sans cesse au courage incroyable des combattants.

Le contexte de la bataille de Dien Bien Phu

Depuis l’année 1946, la France est aux prises dans ses colonies d’Indochine avec les forces du Viêt Minh, c’est-à-dire l’armée du parti communiste vietnamien dirigées par Hô Chi Minh, qui revendique l’indépendance du Vietnam.

L’affaiblissement des Français en Indochine, après l’occupation japonaise pendant la seconde guerre mondiale, est manifeste. Malgré un déploiement important de troupes de professionnels et de volontaires, les français n’arrivent pas à endiguer la progression de leurs ennemis. L’essor des communistes en Chine, avec la victoire de Mao Ze Dong en 1949, encourage les Vietnamiens dans leur lutte. La Chine et l’URSS soutiennent ouvertement le Viêt Minh en le faisant bénéficier d’un soutien logistique massif. En fait, c’est le viêt Minh lui-même qui finit par cesser son avancée, faute de pouvoir stabiliser ses voies de ravitaillement extrêmement étirées et peu praticables.

En mai 1953, les français ont compris depuis longtemps que leur situation en Indochine n’est pas tenable. Tôt ou tard, ils seront forcés de partir. Mais ils veulent le faire dans les meilleures conditions possibles, notamment sur le plan diplomatique. Le général Navarre est nommé à la tête du CEFEO – Corps Expéditionnaire Français En Orient – avec la mission d’amener une solution politique honorable. En août 1953, les troupes Viet Minh, menées par le général Giap, reprennent leur avance. Les français prennent alors la décision de créer un camp retranché pour fixer leur adversaire et lui infliger des pertes sévères en le forçant à se battre autrement que par la guérilla. C’est la même tactique qui avait été utilisée pour la bataille de Na San, en 1952, où les troupes de Giap s’étaient faites massacrer sur les systèmes défensifs d’un camp retranché français monté pour la circonstance.

Les français jettent leur dévolu sur le site de Dien Bien Phu, une plaine du haut Tonkin dans le nord-ouest du Vietnam. La position offre plusieurs avantages. Géographiquement, elle présente l’intérêt d’être située en plein milieu du dispositif Viêt Minh. C’est la seule plaine agricole à plusieurs centaines de kilomètres à la ronde, ce qui priverait ainsi l’armée de Giap d’une bonne source de ravitaillement proche. La rivière Nam Youn qui traverse la plaine est bordée par un ancien aérodrome japonais de la seconde guerre mondiale qui pourrait facilement être remis en état. Enfin, toute la plaine est entourée de hautes collines, ce qui permettrait aux défenseurs d’avoir des positions élevées favorables tout en empêchant l’artillerie Viêt Minh de bombarder efficacement le site principal. Dien Bien Phu ressemble donc à une énorme « cuvette » orientée nord-sud, de 17 km de long pour 5 à 7km de large.

Forts de leur expérience dans cette guerre et de leur très grande connaissance des tactiques de guerre du Viêt Minh, les français jugent que l’armée de Giap ne pourra pas les attaquer à Dien Bien Phu en bénéficiant d’une logistique suffisante. Seules deux voies d’accès terrestres y mènent. Trop loin de ses bases arrière, le Viêt Minh ne pourrait pas recevoir assez d’artillerie lourde, de munitions ou de ravitaillement en quantité suffisamment importante. Par contre, l’aérodrome permettrait aux français d’être largement ravitaillés par les airs, et leur position centrale leur permettrait d’effectuer de nombreuses incursions pour contrecarrer les déplacements du Viêt Minh.

La prise par les français

Le 20 novembre 1953, les français déclenchent l’opération ” Castor”. Deux bataillons parachutistes, le célèbre 6ème BPC – Bataillon de Parachutistes Coloniaux – dirigé par le chef de bataillon Bigeard et le 2ème bataillon du 1er RCP – Régiment de Chasseurs Parachutistes – sautent sur la cuvette de Dien Bien Phu défendue par le 148ème régiment Viêt Minh. Les paras emportent l’affrontement. Au soir, ils comptent 15 morts et 34 blessés au combat ainsi qu’ 1 tué et 13 blessés lors du parachutage. En face, le Viet Minh a 115 tués et 4 blessés. Le capitaine Jean Raymond, médecin du 6ème BPC, est tué pendant sa descente en parachute. C’était son premier saut opérationnel. Il est le premier tué français de la bataille de Dien Bien Phu.

D’autres paras sont immédiatement amenés en renfort, ainsi que du matériel lourd. L’ancien aérodrome est rénové et, dès le 25 novembre, un gigantesque balais de transports aériens achemine sur le site de très grandes quantités de matériel, de ravitaillement, d’hommes et de munitions. Une partie des paras est ensuite évacuée. Les français commencent alors la mise en place d’un puissant camp retranché. Il s’agit en fait de protéger la piste d’aviation par laquelle arriveront tous les renforts et ravitaillements.

La bataille de Dien Bien Phu est donc engagée dès le 20 novembre 1953. Elle va durer au total 170 jours.

Autour de l’aérodrome, quatre points d’appui – PA – forment la colonne vertébrale du dispositif. Plus au sud, un second centre de résistance, avec des chars et de l’artillerie, doit couvrir le premier. Sur les hauteurs entourant les quatre PA, les français installent des postes de résistances destinés à protéger plus avant la piste d’atterrissage en empêchant le Viêt Minh de s’en approcher à vue. Toutes ces hautes positions fortifiées sont poétiquement baptisés avec des prénoms de femmes par le chef du camp, le colonel de Castries : Eliane, Isabelle, Claudine, Huguette, Dominique, Béatrice, Gabrielle, Anne-Marie. Les postes composant ces points d’appui reçoivent des numéros pour les identifier rapidement (Eliane 1, 2, Dominique 3, etc…)

Les français sont très confiants. Leur moral est très élevé. Ils sont persuadés que le Viêt Minh va littéralement se casser les dents sur Dien Bien Phu. Leurs services de renseignement fonctionnent à plein et ils s’attendent à une attaque à partir du 13 mars sur Béatrice.

En attendant, les escarmouches avec des patrouilles Viêt Minh se multiplient et les excursions françaises hors du périmètre confirment que Giap a entrepris d’encercler Dien Bien Phu avec ses troupes.

Le 5 mars, le colonel de Castries ordonne une opération sur la côte 781 pour détruire un canon vietnamien qui tire sporadiquement mais impunément sur la piste d’aviation.   La 4ème compagnie du 1er B.E.P. se fait surprendre par des blockhaus Viet Minh particulièrement bien camouflés et engage un violent corps à corps.

Le 11 mars, les 1ère et 2ème compagnies du 1er B.E.P engagent violemment des positions Viet Minh un peu à l’est de Béatrice, à 3km seulement du PC français. Les unités Viet Minh sont contraintes de décrocher et se replient sur leur position principale soutenues par de puissants tirs de mortiers. Il est clair que l’étau Viet Minh se resserre.

Le 12 mars, au rapport journalier avec son état-major, le colonel de Castries annonce : “Messieurs, c’est pour demain 17 heures”. Le rideau sur la tragédie de la bataille de Dien Bien Phu est sur le point de se lever.

Le 13 mars, en effet, l’enfer se déchaine sur les défenseurs de Dien Bien Phu…

[ A suivre ]

Quitter la version mobile