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L’armistice du 11 novembre 1918 a pris effet à la onzième heure du onzième jour du onzième mois de la quatrième année de la première guerre mondiale. Très exactement quatre ans, trois mois et neuf jours de combats terriblement meurtriers. Il avait été signé six heures plus tôt, un peu après 5 heures du matin, par les représentants alliés et allemands dans le wagon d’état-major aménagé du général Foch, dans la clairière de Rethondes en forêt de Compiègne. Il marquait la victoire des armées alliées et la capitulation de l’Allemagne.

 

Armistice du 11 novembre 1918 | historyweb

Vers l’armistice du 11 novembre 1918

Malgré le traité de Brest-Litovsk, signé le 3 mars 1918, qui avait amené à la reddition de la Russie et permis à l’Armée allemande de se concentrer sur le front de l’Ouest, la situation était mauvaise pour les troupes du Kaiser. En juillet 1918, lquarante-deux divisions américaines ont solidement renforcé les armées alliées. Après avoir subi une ultime offensive pendant les premiers mois de l’année, elles avaient finalement contenu avec succès des divisions allemandes à bout de souffle lors de la seconde bataille de la Marne, et était parvenu à lancer une série de contre-offensives qui les avaient largement repoussées vers le Rhin. Depuis août, les forces allemandes reculaient en bon ordre, mais avec de lourdes pertes, avec des carences terribles de renforts, de soins et de ravitaillement, sur l’ensemble du front franco-belge.

Au cours des semaines précédentes, le haut commandement allemand avait enfin compris qu’il ne pourrait plus gagner la guerre. La flotte s’était mutinée à Kiel et la révolution menaçait dans les rues. A la veille de la signature de l’armistice, le Kaiser lui-même s’était enfui aux Pays-Bas. On lui avait conseillé d’abdiquer. Le Reichstag avait proclamé la république. Les alliés de l’Allemagne – l’Autriche-Hongrie, la Bulgarie et la Turquie – s’étaient retirés du conflit. Aussi, dès le 5 octobre, l’Allemagne avait entamé des négociations avec les Alliés.

La signature de l’armistice du 11 novembre 1918

Le 5 novembre 1918, à 6 heures du matin, le caporal Maurice Hacot, en service au centre radio-télégraphique de la tour Eiffel, reçoit un message en morse émis depuis Spa en Belgique. Il s’agit de la demande d’armistice de l’état-major allemand. On transmet très rapidement le message au haut état-major français. Celui-ci informe immédiatement Georges Clémenceau. Deux jours plus tard, le 7 novembre, un représentant du gouvernement allemand, Matthias Erzberger, arrive dans les lignes françaises. Il emmène avec lui une petite délégation de plénipotentiaires. Sous bonne escorte, ils arrivent au village de La Capelle. Puis on les amène en voitures jusqu’à la clairière de Rethondes. Ce lieu discret comportaint deux voies ferrées parallèles servant à déplacer les pièces d’artillerie lourde. Deux trains y sont spécialement stationnés. Celui du maréchal Foch, et un pour recevoir les délégués allemands.

Les discussions s’engagent. En réalité, les allemands se rendent très vite compte que leur marge de négociation est quasi nulle. Les alliés leur soumettent un texte énonçant toutes leurs conditions, auquel Foch avait fini par apposer sa signature finale en usant de son autorité de chef suprême des armées alliées après un mois de tergiversations stériles entre les différents dirigeants des puissances alliés. Les clauses arrêtées par le texte sont très strictes.

Des conditions drastiques

Sous quinze jours après la signature par les parties, l’Allemagne doit évacuer tous les pays qu’elle a envahi, l’Alsace-Lorraine, la rive gauche du Rhin et une bande de dix kilomètres sur la rive droite. Sous trente jours, elle doit abandonner les têtes de pont de Mayence, Coblence et Cologne. Tous ses soldats stationnés dans des pays alliés de l’Allemagne doivent réintégrer leurs frontières. Elle a en outre l’obligation de livrer un impressionnant matériel de guerre, entre autres 5000 canons, 1700 avions, tous ses sous-marins, 5000 camions, 5000 locomotives et 150 000 wagons.

Les alliés se montrent inflexibles. Foch en particulier. Il tient la même ligne dure que Clémenceau. D’autant plus que le 9 novembre, la situation se dégrade brutalement en Allemagne.  Le Kaiser abdique et s’exile au Pays-Bas. Pour les délégués allemands réunis à Rethondes, le coup est rude. Il anéantit définitivement leurs maigres espoirs d’obtenir quelques concessions favorables de la part des alliés. Dès le 10, le nouveau gouvernement de Berlin leur fait parvenir des messages pressants. L’ordre est clair : signer l’armistice au plus vite, sans plus chercher à discuter. Berlin craint par dessus tout de se faire déborder par les mouvements révolutionnaires d’extrême gauche.

La signature

Les délégations signent donc officiellement l’armistice très tôt le lendemain. Peu après 5h, au petit matin du 11 novembre 1918. Foch réunit dans son wagon son chef d’état-major, le général Weygand, ainsi que les amiraux britanniques Wemyss et Hope. Les deux représentants du gouvernement allemand arrivent ensuite. Il s’agit de Matthias Erzberger et du Comte von Oberndorff, accompagnés de deux officiers allemands.

L’armistice entre en vigueur sur le front le même jour à 11 heures pour une durée de 36 jours. Français, britanniques et allemands le renouvelleront trois fois. À chaque fois dans le même  wagon, mais à Trèves. Ensuite le 12 décembre pour un mois. Le 16 janvier 1919 pour un mois supplémentaire. Puis le 16 février 1919 pour une durée illimitée. À la suite de cet armistice est signé le traité de Versailles, le 28 juin 1919.

 

Signature de l'armistice du 11 novembre 1918 dans la forêt de Retonde

Signature de l’armistice du 11 novembre 1918

Après l’armistice

La nouvelle de la signature de l’armistice déclenche une vague de joie dans le monde entier. Et, bien-sûr, plus particulièrement en Europe et en France. Partout, dans chaque ville et village, on fait sonner les cloches. Les gens descendent dans les rues drapeau à la main et chansons à la bouche. En Angleterre, la foule envahit Trafalgar Square. À New-York, Broadway est inondé de monde.

Mais toutes ces manifestations de joie n’empêchent pas le terrible bilan. Le coût humain de la guerre est tout simplement ahurissant. On estime aujourd’hui les pertes humaines ainsi. Tous belligérants confondus, on compte soixante-cinq millions d’hommes mobilisés. Parmi eux, on dénombre huit millions et demi de morts. Mais aussi vingt et un millions de blessés. Dont environ huit millions d’invalides. On compte également huit millions de prisonniers. Six millions de civils perdirent également la vie. La guerre a mis en conflit plus de soldats et a provoqué plus de morts et de destructions que toutes les autres guerres antérieures.

De plus, d’autres événements majeurs se sont produits pendant cette période. Le génocide arménien (1915-1916). La révolution russe (1917). Puis la terrible épidémie de grippe espagnole à partir de 1918. La guerre a également amené des bouleversements géopolitiques. Ceux-ci ont profondément et durablement modifié le cours du XXe siècle. Elle a été la cause directe de l’effondrement et la fragmentation des empires austro-hongrois, russe et ottoman.

Une humiliation pour les allemands

Pour les Allemands, l’armistice du 11 novembre 1918 est resté longtemps comme un jour de honte et d’humiliation. Le 28 juin 1919, le traité de paix signé à Versailles va leur imposer de s’acquitter de dommages de guerre considérables. Ils devront abandonner de vastes territoires. Dont l’intégralité de leurs colonies. Mais aussi des quantités pharaoniques de matériel de guerre. Sans compter les dédommagements financiers dont les montants seront tout simplement exorbitants.

Ce traité aura plus tard des conséquences économiques, sociales, sociologiques et politiques absolument catastrophiques pour l’Allemagne. Il sera bientôt perçu comme une injustice insoutenable par la population allemande. Les extrémistes nationalistes en profiteront. Ils ancreront fermement dans les esprits l’idée que les armées n’avaient pas perdu militairement la guerre. Mais que ce sont les gouvernants libéraux faibles et corrompus qui ont trahi le pays. En le livrant à l’humiliation et au chaos. Ce traité de paix sera l’une des raisons pour lesquelles les allemands vont se donner corps et âmes, quatorze ans plus tard, à Adolphe Hitler.

Le soldat inconnu

C’est en 1916 qu’apparaît pour la première fois en France l’idée de rendre hommage aux soldats de la Grande Guerre morts pour la France. On pense dans un premier temps aux morts non identifiés dont le souvenir ne peut jamais être rappelé, par définition.  Il faut toutefois attendre 1920 pour que le parlement vote une loi en ce sens le 8 novembre, et qu’après une longue querelle pour savoir si la dépouille serait ou non placée au Panthéon comme celle de Gambetta, on décide que le cerceuil d’un soldat inconnu serait inhumée sous l’Arc de Triomphe à Paris.

André Maginot, mutilé de guerre lui-même et alors ministre des Pensions, préside à la cérémonie qui entérinera le choix du soldat à inhumer. Elle va se dérouler dans un lieu hautement symbolique pour les français : la citadelle de Verdun. Dans un souci symbolique de justice et d’équité vis à vis de tous les soldats morts pour la France non identifiés, on a exhumé huit corps de soldats que personne n’avait pu identifier, ayant servi sous l’uniforme français dans les huit régions où s’étaient déroulés les combats les plus meurtriers : l’Artois, la Champagne, le Chemin des Dames, les Flandres, l’île de France, la Lorraine la Somme et bien-sûr Verdun.

Le choix du cercueil

Le 9 novembre 1920, les huit dépouilles déposées dans des cercueils de chêne massif rendus anonymes sont amenées dans la citadelle de Verdun. Plusieurs fois, des soldats à chaque fois différents et désignés au hasard sont chargés de changer les cercueils de place, pour que personne ne puisse plus déterminer ne serait-ce que la région d’où provient chaque corps.

Le 10 novembre, les cercueils sont déposés dans une chapelle ardente en deux colonnes de quatre. On leur octroie une garde d’honneur formée par des soldats du 132° régiment d’infanterie. Parmi eux, le jeune Auguste Thin, soldat de deuxième classe de vingt et un an, pupille de la nation car son père a été tué au début de la grande guerre.

C’est vers lui qu’André Maginot s’avance. Il lui tend un bouquet d’œillets blancs et rouges et lui confie le lourd privilège de désigner le cercueil de celui qui deviendra le soldat inconnu. Le jeune soldat fait d’abord lentement un tour complet par la droite des huit cercueils. Puis il entame un second tour par la droite, longe les quatre premiers cercueils, tourne lentement sur la gauche et va s’arrêter devant le sixième. Il y dépose son bouquet et se met de lui-même au garde à vous. Quant à ce choix du sixième cercueil, il dira :

«Il me vint une pensée simple. J’appartiens au sixième corps. En additionnant les chiffres de mon régiment, le 132ème, c’est également le chiffre 6 que je retiens. Ma décision est prise : ce sera le sixième cercueil que je rencontrerai.»

 

L’inhumation du soldat inconnu

Le 11 novembre 1920, on place le cercueil du soldat inconnu dans une chapelle ardente. On l’a spécialement aménagée près de l’Arc de Triomphe. C’est le 28 janvier 1921 qu’un détachement inhume le cercueil du soldat inconnu, dans la tombe creusée sous le monument. Il faut attendre le 11 novembre 1923 pour que le ministre de la guerre, André Maginot, allume «la flamme qui ne s’éteint jamais». Depuis cette date, chaque soir à 18h30, sous la supervision du Comité de la Flamme, on procède à la cérémonie du “ravivage de la Flamme” sur la tombe du soldat inconnu.  Avec porte-drapeaux, dépôt de gerbe, clairons et tambours de la Garde Républicaine.

 

Armistice du 11 novembre 1918 | Descente au tombeau du soldat inconnu | historyweb 2

Le 11 novembre, jour de souvenir

L’anniversaire de l’armistice du 11 novembre 1918 est devenu un jour férié en France par la loi du 24 octobre 1922 qui le désigne comme le «jour du Souvenir».  Depuis lors, des célébrations traditionnelles de l’armistice du 11 novembre sont organisées dans chaque commune de France. Elles rassemblent des citoyens ordinaires et des élus autour des monuments aux morts devant lesquels ont lieu discours, dépôts de gerbes, appels nominatifs des morts de la commune que suit la sonnerie aux morts et une minute de silence.

A Paris, les commémorations de l’armistice du 11 novembre sont régies selon un cérémonial strict et solennel. Le Président de la République porte ce jour là le Bleuet de France à sa boutonnière. Il dépose une gerbe devant la statut de Georges Clémenceau. Avant de remonter les Champs-Elysées sous l’escorte de la Garde républicaine à cheval. Il passe ensuite les troupes en revue place Charles de Gaulle. Puis il va se recueillir sur la tombe du soldat inconnu où il dépose une gerbe et ravive la flamme.

Le dernier «poilus» français, M. Lazare Ponticelli, est décédé en 2008. Puis en 2011 est mort le dernier de tous les vétérans de la première guerre mondiale, le britannique M. Claude Stanley Choules. Le président Nicolas Sarkozy annonce alors le 11 novembre 2011 qu’il souhaite faire de l’anniversaire de l’armistice du 11 novembre 1918 un jour «de commémoration de la Grande Guerre et de tous les morts pour la France». Une décision entérinée par le Parlement le 20 février 2012. Puis par le Président François Hollande qui honore, le 11 novembre 2012, «la mémoire de tous les soldats morts pour la France en opération».